mercredi 2 novembre 2016

Cop 22 au Maroc : Quelles perspectives pour l'Afrique ?

Article parue dans « L'Essentiel Afrik »

1-   Le Maroc est le seul pays d'Afrique qui va
recevoir la Conférence des Nations unies sur le
climat pour la deuxième fois en l'espace de 15
ans après avoir abrité cette rencontre en 2001.
Quels sont les atouts dont dispose le royaume
chérifien et qui justifient cette réalité ?



Madame la ministre Marocaine  chargée de la préparation de la  Cop 22 au Maroc Mde Hakima El Haite

Jamais les paroles de Sa Majesté le roi Hassan II ne résonneront avec autant de force que lors du prochain sommet de la Cop 22  quand il comparait le Maroc  à un arbre plongeant ses racines en Afrique et respirant par ses feuilles en Europe.
Le Maroc dispose de nombreux atouts pour être porte-drapeau de l’Afrique lors de  cette conférence des Nations unies sur le climat. Il a su profiter de la dynamique de l’Union pour la Méditerranée pour lancer des projets d’énergies renouvelables à grande échelle ; réalisant à Ouarzazate le plus grand projet de ferme solaire au monde NOOR 1. Ce complexe est doté de trois centrales thermo-solaires à concentration.






La station Noor Ouarzazate 1 est en phase de test et sera lancée d'ici la fin de l'année 2015. © Nadia Sweeny.

Le plan solaire marocain  couvre l’ensemble du territoire et ambitionne de produire 2000 MW en énergie solaire d’ici à 2020.
Il peut aussi se prévaloir de la réalisation du plus grand parc éolien d’Afrique à Tarfaya.
Plus d’un million et demi de personnes seront logées dans des cités vertes, sans émission de carbone.

La station Noor Ouarzazate 1 utilise la technologie thermo-solaire avec capteurs cylindro-paraboliques. © Nadia Sweeny.

Une gestion des eaux usées de la ville de Marrakech utilise une des technologies les plus élaborées du monde.
Une modernisation de son réseau de transport,  TGV et tramways qui se multiplient.
Une labellisation de ses plages dans un tourisme durable.
Une gestion raisonnée des irrigations en agriculture.
Toutes ces innovations basses carbones relèvent d’une vision stratégique pour placer le Maroc dans une économie verte dans tous les secteurs de l’économie.



Le soleil chauffe un liquide dans le tube : la vapeur dégagée lors de son refroidissement enclecnhera des turbines qui fabriqueront l'électricité. © Nadia Sweeny.

Ce pays, tête de pont entre l’Afrique et le reste du monde, présente tous les atouts  pour booster les négociations sur le climat  lors du sommet de Marrakech et capitaliser les fonds verts sur  des projets concrets efficients  et adaptés aux réalités  africaines.


2-   Qu'est-ce que l'organisation d'une manifestation comme la Cop 22 apporte au Maroc et plus généralement à l'Afrique au-delà du prestige lié à l'image ?

Les principales revendications des pays africains étaient d’ordre financier  pour compenser une injustice écologique.
Déjà adulé en Afrique subsaharienne pour ses prouesses économiques et technologiques, le Maroc en réussissant sa Cop 22  pourra devenir une  locomotive et un référent pour engager l’Afrique dans  l’économie verte et sans carbone.  Comme  elle a su faire un saut technologique en matière de téléphonie  et  se surpasser en innovation en mobile banking, l’Afrique doit inventer son modèle de développement durable ; profitant de l’expertise marocaine et du Maghreb dans les domaines de la finance, du numérique, de l’énergie, de l’agriculture, pour bâtir des projets Sud-Sud, véritables accélérateurs de croissance.

C’est en initiant des modèles d’ingénieries financières et de structuration des projets que nos États pourront utiliser habilement la compensation des 100 milliards de dollars par an décidée à Paris et permettre aux différents mécanismes de financements de fonds verts de booster leur croissance et légitimement irriguer les circuits économiques locaux en participant au développement inclusif.
Le Maroc a  justement choisi de réintégrer la famille africaine  avec  un double objectif,  rehausser son prestige  en matière économique et diplomatique, mais également la réussite de cette Cop 22 lui permettra de valoriser son expertise auprès des institutions internationales.  Avec en ligne de mire le futur  règlement de la question du Sahara. Cette conférence  va coûter quelque  100 millions deuros au Maroc, avec une participation financière de lEurope,  de la Pnud, des pays arabes.  Et une étroite synergie avec la France pour capitaliser sur la première réussite  des accords obtenus lors de la Cop 21. Avec comme objectifs daboutir sur des résultats concrets.


3- En quoi peut-on s'attendre à ce que les
conclusions de la Cop 22 marquent une étape
importante dans la lutte contre le réchauffement climatique à l'échelle de la planète ?

LAfrique et son émergence tant décriée par les économistes reste le véritable baromètre  de la réussite  de ma lutte contre le réchauffement climatique. Ici  toutes les villes seront à construire. Un eldorado sans précédent accompagné  dune démographie galopante et des taux de croissance qui avoisinent les deux chiffres.  Actuellement plus de 600 millions dAfricains nont pas encore accès à lénergie malgré tout son potentiel  solaire et hydraulique.
La priorité devra être donnée pour ce secteur pour éradiquer définitivement lutilisation du bois  dans la cuisine traditionnelle.



Une catastrophe écologique de grande ampleur en Afrique de l'ouest  l'utilisation du bois pour la cuisine. Alors que nos pays disposent de reserves de gaz... Quelles solutions ?
Le Maroc se présente comme un hub pour le reste de lAfrique, ses banques et ses entreprises de construction et de cimenterie  sont présentes dans une vingtaine de pays, et des collaborations très étroites entre le Medef et la CGEM, confédération des entreprises marocaines se multiplient dans les domaines des villes durables, de lénergie,  du  numérique. Les entreprises africaines gagneraient à se greffer à cette dynamique, dans une  organisation tripartite, Europe, Maghreb, Afrique subsaharienne, pour  une croissance durable.
On pourra envisager en plus des hubs technologiques ou dénergie,  de grands projets dinfrastructures routières relier les deux grands axes   Abidjan-Dakar-Tanger  ou Abidjan-Bamako-Alger, ressouder les dynamiques de développement de ces deux régions de lAfrique et y installer une paix durable. (Ces régions ont toujours été dans lhistoire des corridors de commerce et déchanges scientifiques à travers Tombouctou).

Tous les acteurs non étatiques,  la société civile,  les syndicats,  les régions  et  les villes doivent aussi se mobiliser pour  accélérer le processus de ratification des accords de la Cop 21 et engager  les énergies  citoyennes vers des processus de réalisation pour lutter contre le réchauffement climatique.


Si  la Cop 21 à Paris  était le sommet des décisions,  celle de Marrakech doit être  la Cop  des actions concrètes.  Il revient à nos acteurs politiques de surfer sur cette vague en apportant des projets innovants profitant de la richesse de la biodiversité africaine, de son potentiel énergétique,  de sa force vitale  de sa capacité de créativité , de sa richesse culturelle  pour dessiner les contours dune Afrique émergente prospère et respectueuse de sa terre ancestrale.


Ibrahim EL-ALI

Président de Bluegreen France

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